top of page

La trame sonore d’un film : une histoire de droits d’auteur

Dernière mise à jour : 17 janv. 2023


Photo : Maggie Pelletier


Jongler avec les droits d’auteur musicaux au cinéma en tant que petit marché québécois s’avère rarement une chose aisée. On le constate dans les exemples comme le cas de C.R.A.Z.Y., où les titres de la trame sonore appartiennent à des géants de la musique. Mais qu’en est-il ici? L’état de l’industrie musicale québécoise en 2023 étant toujours précaire, les droits d’auteur associés deviennent primordiaux pour accéder à un revenu convenable.


Je me suis penchée sur la question des droits d’auteur musicaux puisque c’en est une qui fait toujours jaser. J’ai constaté – sans grande surprise – que sa complexité est notoire, et que nombreux sont les enjeux à prendre en compte.


Le milieu de la musique à l’ère du numérique

La présence des plateformes d’écoute en continu telles que Spotify et Apple Music n’aide pas au financement de nos artistes d’ici. On se rappelle lorsque Pierre Lapointe s’est emporté à ce sujet au Gala de l’ADISQ en 2019. Ce fût un bon témoignage de nos moments d’éveils par intervalles par rapport aux revenus des musicien.nes au Québec…


On constate alors la difficulté des artistes à atteindre un revenu stable qui équivaut au nombre d’heures de travail et au nombre de minutes d’écoute sur les plateformes de streaming. La vente de CDs et de vinyles étant toujours moindre, tout comme on le constate au cinéma en question de DVDs, les revenus sont minces dans le monde artistique.


La question de la découvrabilité

L’algorithme des plateformes de streaming et ses calculs mystérieux ne mettent pas en valeur les artistes québécois.es efficacement. Rares sont les recommandations adaptées aux goûts de chacun et chacune. De ce fait, en tant qu’artiste émergent.e, faire sa place dans le milieu constitue un réel défi. Dans notre monde de surabondance de contenus (numériques!), se démarquer nécessite une bouchée double d’efforts, de talents et de - pas le choix - chance.


Ainsi, autant les cinéastes ont leurs raisons de vouloir une pièce musicale en particulier dans leur film, autant les musicien.nes peuvent en avoir d’entendre leur œuvre jouer dans une production audiovisuelle. En effet, la présence de leur musique dans un film peut aider au rayonnement de cette dernière, et même à sa découvrabilité, au sein de nouveaux publics. On y gagne donc des deux côtés, celui du film et celui de la musique. Je ne sais pas pour vous, mais je peux affirmer que nombre de morceaux se retrouvent dans mes favoris après que je les ai entendus dans un film.


Un outil pour indexer sa musique

Au fil de mes recherches, je suis tombée sur un guide ayant pour but d’aider les artistes de la province à se faire entendre et à distribuer leur musique. Méta-musique, une initiative soutenue par le gouvernement du Québec, permet aux créateurs et créatrices d’indexer leurs contenus de manière plus simple. En dernière étape du processus, on retrouve des clés quant à l’exploitation de la musique, dont l’envoi à la distribution et aux médias. Les contenus deviennent ainsi visibles et repérables. Éventuellement, la musique, mieux identifiée à l’aide de métadonnées, surgira convenablement dans les algorithmes et sera sujette à se retrouver dans davantage de productions cinématographiques.


Les musiques de film : plus qu’essentielles

La trame sonore d’un film est d’une grande importance, c’est elle qui porte l’histoire, les émotions, qui peut faire passer des doubles messages, qui peut agir en tant que repère temporel et plus encore. Pas étonnant que les artisans de films, une fois qu’ils et elles ont une idée de titre particulier en tête, y soient très attaché.es et prêt.es à se battre pour en obtenir les droits. Mais à quel prix? Ce n’est jamais chose aisée que de le déterminer et les négociations peuvent se montrer rudes pour les choix les plus ambitieux.


Droits éditoriaux, droits sur l’enregistrement et droits de synchronisation

Pour accéder aux droits d’une œuvre musicale, on doit les libérer des droits éditoriaux (il s’agit des droits sur l’œuvre et sa composition, donc les droits des auteurs et autrices, compositeur.rices et interprètes), ainsi que des droits sur l’enregistrement (aussi appelés droits phonographiques, ce sont les droits sur le master, c’est-à-dire la bande maîtresse, propriété du producteur.rice).

On obtient ainsi une licence de synchronisation et d’utilisation de l’enregistrement, en signant une entente avec les propriétaires et artistes de l’œuvre musicale.


Des trames sonores constituées de grands titres

Dans le cas du reconnu C.R.A.Z.Y., de Jean-Marc Vallée, les droits furent difficiles à acquérir, mais la trame sonore étant un noyau de l’œuvre, l’entente fut d’acheter les droits musicaux 10 ans pour commencer. La somme déboursée (quelque 600 000$) comprenait les droits pour ces premières années, mais ensuite, le film dû se retirer des plateformes de streaming et des parutions en salle de cinéma, les droits ayant atteint leur date d’expiration. Vallée et Pierre Even, producteur du film, ont fait appel à Joss Dumas, superviseur musical, qui a pu négocier les droits à nouveau en 2021, après six ans d’absence.

Image tirée du film C.R.A.Z.Y. de Jean-Marc Vallée, 2005


Ce n’est qu’un exemple de cas médiatisé dans les dernières années. On assiste régulièrement à des situations semblables où la négociation des droits de la musique se révèle un véritable casse-tête, surtout pour les plus petites productions qui n’ont pas les plus grands moyens.



Sources consultées pour la rédaction de cet article:

191 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout
bottom of page